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Mandats des dirigeants de SAS : les statuts priment sur les décisions des associés et les accords contractuels

Les statuts d’une société précisent les règles la gouvernant, et notamment la structure de la direction et les conditions de nomination, et révocation et d’exercice des mandats de ses dirigeants. Les récentes décisions de la Cour de cassation rappellent qu’en matière de SAS (société par actions simplifiée), la liberté statutaire reconnue par l’article L. 227-5 du Code de commerce offre certes une grande souplesse dans la détermination des règles internes, mais impose en contrepartie une application rigoureuse de celles-ci tout au long de la vie sociale.

Or, que se passe-t-il lorsque, en cours de vie sociale, les associés conviennent avec un futur dirigeant des conditions de mandat social contraires aux statuts ? Une simple ratification par décision unanime des associés ou la stipulation de ces conditions dans un contrat suffisent-elles, ou faut-il procéder à une modification des statuts ?

Dans un premier arrêt du 9 juillet 2025,1 la Cour de cassation rappelle qu’une décision d’associés peut venir compléter les statuts, mais non y déroger entièrement, même lorsqu’elle est prise à l’unanimité. Dans un second arrêt du même jour,2 elle précise que les accords extra-statutaires conclus entre les associés et un dirigeant ne sont pas opposables à la société : ils n’engagent que la responsabilité contractuelle des signataires, ouvrant droit, le cas échéant, à indemnisation du dirigeant lésé.

Les décisions prises en assemblée ne peuvent contrevenir aux statuts

Dans le cas du premier arrêt du 9 juillet 2025, les statuts d’une SAS stipulaient que le directeur général pouvait être révoqué par décision du président à tout moment, sans qu’un juste motif ne soit nécessaire.

Par une décision d’assemblée générale prise à l’unanimité, les associés ont nommé un directeur général en précisant les conditions de son mandat. Au titre de celles-ci, il ne pouvait être révoqué que par une décision collective des associés dans trois hypothèses précisément définies.

Quelques temps plus tard, le directeur général fut révoqué en-dehors de ces cas limitativement prévus. Il invoqua alors la violation de la décision d’assemblée l’ayant nommé pour demander réparation à la société. La cour d’appel lui donna raison, considérant que la décision unanime des associés démontrait leur volonté non équivoque de déroger aux statuts. Elle releva en outre que cette décision avait été adoptée dans les formes requises pour une modification statutaire, de sorte qu’elle était bien opposable à la société, bien que contraire aux statuts.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 227-1 et L. 227-5 du Code de commerce. D’une part, elle rappelle que les statuts d’une SAS fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée, notamment les modalités de révocation de ses dirigeants. D’autre part, elle précise que si une décision des associés peut compléter les statuts sur ce point, elle ne peut y déroger, même par une décision prise à l’unanimité.

La solution retenue ne surprend pas et complète une série de décisions affirmant la primauté des statuts dans la hiérarchie des normes applicables à la SAS, initiée en 2017.3 Cette année-là, la chambre commerciale avait consacré le principe du monopole des statuts dans l’organisation de la gouvernance d’une SAS.

En 2022, la même chambre avait toutefois nuancé cette position en admettant que les actes extra-statutaires (tels que les pacte d’associés) pouvaient compléter les statuts, sans toutefois les contredire.4

Les enseignements de l’arrêt

La décision de 2025 apporte deux précisions importantes. Premièrement, elle confirme que les décisions sociales, même prises à l’unanimité, sont soumises aux mêmes limites que les actes extra-statutaires : elles peuvent compléter les statuts, mais ni les contredire ni les contourner.

Deuxièmement, cette décision — comme les précédentes — intervient concernant les règles de direction de la SAS. La question reste posée d’une portée plus large, à savoir si le principe devrait s’appliquer à toutes les hypothèses dans lesquelles la loi confie aux statuts le soin d’organiser un dispositif ou de prévoir certaines modalités de fonctionnement.

Enfin, il faut rappeler qu’au regard de son visa, la décision devrait se limiter aux SAS. S’agissant des sociétés à responsabilité limitée (SARL), il a été admis par la jurisprudence qu’il pouvait être dérogé à une clause statutaire par un acte postérieur, dès lors que tous les associés y consentaient.5

L’opposabilité des engagements contractuels à leur signataire, même contraires aux statuts

Dans son second arrêt rendu le 9 juillet 2025, la Cour de cassation juge valable un engagement extra-statutaire figurant dans un pacte d’associés conclu entre les associés et le directeur général pressenti. Aux termes du pacte, les associés s’engageaient à faire le nécessaire pour que la décision de nomination du directeur général comporte une indemnité de révocation, alors même que les statuts stipulaient que le dirigeant pouvait être révoqué sans indemnité.

La Cour a considéré que le dirigeant bénéficiait d’un engagement valable des associés, permettant de rechercher leur responsabilité contractuelle en cas de manquement. En revanche, il ne peut se retourner contre la société elle-même, l’accord n’étant pas opposable à celle-ci, de sorte qu’il ne peut lui réclamer directement le paiement de l’indemnité convenue.

Cette solution demeure toutefois insuffisamment protectrice pour le dirigeant. En effet, la protection dont il dispose est incertaine : bénéficie-t-il d’un engagement des associés signataires de l’accord constitutif d’une obligation de résultat ou d’une simple promesse de porte-fort, ouvrant droit à l’indemnisation d’un préjudice dont la détermination du montant est incertaine ? Autant de questions encore en suspens, dont la jurisprudence à venir devra préciser les contours.

Recommandations pratiques

Au regard de la jurisprudence actuelle, notamment des arrêts du 9 juillet 2025, il convient pour les futurs dirigeants de SAS de s’assurer que les conditions de leur mandat, telles qu’elles ont été négociées, soient parfaitement compatibles avec les statuts. A défaut, il conviendrait d’exiger la mise en conformité des statuts avant le début du mandat.

Du point de vue des associés, une attention particulière devra être apportée lors de la rédaction des statuts s’ils souhaitent se ménager une certaine flexibilité en cours de vie sociale.

Enfin, le recours à une lettre de mandat peut être envisagé, pour formaliser les conditions négociées entre les parties et préciser les modalités dans lesquelles les statuts devront être mise en conformité avec ces accords.


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  1. Cass. com., 9 juillet 2025, n°24-10.428 ↩︎
  2. Cass. com., 9 juillet 2025, n° 23-21.160 ↩︎
  3. Cass. com., 25 janvier 2017, n° 14-28.792 ↩︎
  4. Cass. com., 12 octobre 2022, n° 21-15.382 ↩︎
  5. Cass. com., 12 mai 2015, n°14-13.744 ↩︎

Retard dans la soumission des comptes annuels aux associés : sanction pénale et possible régularisation

Alors que de nombreuses sociétés clôturant leur exercice au 31 décembre ont achevé au mois de juin la procédure d’approbation de leurs comptes annuels par les associés, un arrêt rendu en début d’année par la Cour de cassation1 précise les conditions d’application de la sanction pénale applicable aux dirigeants qui ne l’auraient pas mise en œuvre.

En effet, selon la Cour, le simple retard dans la présentation des comptes sociaux par le gérant d’une SARL ne suffit pas à caractériser le délit de non soumission, passible d’une amende de 9.000 euros aux termes de l’article L. 241-5 du Code de commerce. Elle ouvre ainsi la voie à une possible régularisation.

Le seul retard dans la soumission des comptes annuels aux associés n’est pas constitutif d’une infraction pénale

En l’espèce, il était reproché au gérant d’une société à responsabilité limitée (SARL) de ne pas avoir soumis aux associés les comptes sociaux pour les exercices 2012 à 2017. Celui-ci a donc été condamné en appel, la cour considérant que l’infraction était constituée en raison du dépassement du délai de six mois suivant la clôture de l’exercice.

La Cour de cassation casse l’arrêt au visa de l’article L. 241-5 du Code de commerce. Elle rappelle que la loi du 22 mars 2012 a supprimé le délai de six mois auparavant imposé au gérant par ledit article pour soumettre les comptes à l’assemblée. Par conséquent, elle affirme que le seul retard dans la présentation des documents comptables aux associés d’une SARL ne suffit pas à constituer une infraction pénale.

Cet arrêt apporte une clarification bienvenue. Suite à la suppression du délai de six mois en matière pénale, la caractérisation de l’infraction prévue à l’article L. 241-5 demeurait incertaine.

La Cour consacre désormais une marge de manœuvre importante au bénéfice du gérant : seule l’absence totale de présentation des comptes ou des autres documents à l’assemblée, et non le simple retard, est susceptible de constituer une infraction pénale au sens de ce texte.

Cette décision a une portée pratique notable dès lors qu’elle conduit à caractériser l’infraction au jour où le juge se prononce, et uniquement si la soumission des comptes aux associés n’a toujours pas eu lieu à cette date. Elle ouvre ainsi la voie à une possible régularisation de la situation jusqu’au dernier moment, ce qui semble limiter encore davantage l’efficacité de la sanction pénale prévue à l’article L. 241-5 du Code de commerce, dont l’application est déjà rare.

Enfin, il faut noter que cette solution jurisprudentielle pourrait être étendue aux sociétés anonymes (SA), dont le texte d’incrimination de l’infraction de non soumission (article L.242-10 du Code de commerce) est quasiment identique, voire aux sociétés par actions simplifiées (SAS) par la possible extension du régime des SA.

Rappels sur les obligations des sociétés commerciales en matière d’approbation des comptes

Au-delà de la sanction pénale prévue par l’article L.241-5 du Code de commerce, les sociétés commerciales sont soumises à des obligations en matière d’approbation des comptes annuels par les associés et de dépôt au greffe qu’il convient de rappeler. Tout manquement peut faire l’objet d’injonctions par le président du tribunal de commerce compétent, le cas échéant sous astreinte. Les dirigeants sociaux peuvent également voir leur responsabilité engagée si de tels manquements ont causé un préjudice à la société ou à ses associés.

Soumission des comptes annuels aux associés pour approbation

Les articles L. 223-26 (pour les SARL) et L. 225-100 (pour les SA) du Code de commerce disposent que le rapport de gestion et les comptes annuels notamment, sont soumis par le gérant, le conseil d’administration ou le directoire (selon le cas), à l’approbation des associés réunis en assemblée, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice. A défaut, une prorogation du délai doit être demandée au tribunal de commerce.

S’agissant des SAS à plusieurs associés, l’article L. 227-9 dispose que l’approbation des comptes annuels relève de la compétence de la collectivité des associés. Les modalités de cette décision, notamment les délais, sont fixées librement dans les statuts. Toutefois, cette liberté statutaire connaît une limite puisque lorsqu’il est prévu une distribution de dividendes, la mise en paiement doit intervenir dans un délai maximum de neuf mois suivant la clôture de l’exercice, sauf prorogation accordée par décision de justice.2 En l’absence de toute stipulation statutaire sur le délai d’approbation des comptes, la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC) recommande de procéder à la consultation des associés dans un délai de six mois suivant la clôture.3

Concernant les SAS à associé unique (SASU), l’associé doit approuver les comptes dans les six mois suivant la clôture de l’exercice en vertu de l’article L. 227-9, alinéa 3.

En cas de manquement, les associés ou le Ministère public peuvent saisir le président du tribunal de commerce afin qu’il enjoigne l’organe compétent, sous astreinte, de convoquer l’assemblée appelée à approuver les comptes ou qu’il désigne un mandataire à cet effet.

Formalités de dépôt au greffe

Enfin, les articles L. 232-22 (SARL) et L.232-23 (sociétés par actions) du Code de commerce imposent le dépôt des comptes annuels, du rapport de gestion, des rapports des commissaires aux comptes (le cas échéant) et de la décision d’affectation du résultat au greffe du tribunal de commerce dans le mois suivant la décision des associés.

Le président du tribunal de commerce peut, à la demande de tout intéressé ou du Ministère public (article L.123-5-1) ou de sa propre initiative (article L. 611-2), ordonner ce dépôt sous astreinte. Le défaut de dépôt peut également faire l’objet de sanctions pénales.


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  1. Cass. Crim du 12 février 2025, n°23-86.857 ↩︎
  2. Article L. 232-13 du Code de commerce ↩︎
  3. Bull. CNCC mars 2004 p. 184 ; Bull. CNCC septembre 2013 p. 479 s. ↩︎

Dividendes : la distribution du report à nouveau après l’assemblée générale annuelle encourt la nullité

Par un arrêt rendu le 12 février 2025,1 la Cour de cassation rappelle que seule l’assemblée générale annuelle appelée à approuver les comptes de l’exercice écoulé est compétente pour décider d’une distribution en dividendes de sommes prélevées sur le compte « report à nouveau ».

Cette décision, ayant les honneurs de la publication au Bulletin, vient apporter des précisions attendues après diverses positions prises par les juges du fonds ces dernières années.

La compétence exclusive de l’assemblée générale annuelle pour distribuer le report à nouveau

Lors d’une assemblée générale en date du 30 avril 2017, les associés d’une société par actions simplifiée avaient approuvé les comptes du dernier exercice et affecté le bénéfice réalisé au compte « report à nouveau ». Lors d’une seconde assemblée générale tenue deux mois plus tard, ils avaient décidé de distribuer des dividendes par prélèvement sur ce report à nouveau. Après la cession de l’intégralité des actions de la société, les anciens associés ont engagé, contre celle-ci, une action en paiement du dividende.

Les règles applicables aux distributions de dividendes par les sociétés commerciales

Rappelons que la distribution de dividendes par les sociétés commerciales est régie par les articles L. 232-11 et L. 232-12 du Code de commerce. Ainsi :

  • l’article L. 232-11, définit le bénéfice distribuable comme « le bénéfice de l’exercice, diminué des pertes antérieures, ainsi que des sommes à porter en réserve en application de la loi ou des statuts, et augmenté du report [à nouveau] bénéficiaire » ;
  • le second alinéa ajoute que « l’assemblée générale peut décider la mise en distribution de sommes prélevées sur les réserves dont elle a la disposition. En ce cas, la décision indique expressément les postes de réserve sur lesquels les prélèvements sont effectués. Toutefois, les dividendes sont prélevés par priorité sur le bénéfice distribuable de l’exercice ».
  • l’article L. 232-12 précise enfin que l’assemblée générale détermine la part du bénéfice distribuable attribué aux associés sous forme de dividendes « après approbation des comptes annuels et constatation de l’existence de sommes distribuables ».

A la lecture de ces textes, on pouvait se demander si les sommes affectées en compte « report à nouveau » par l’assemblée annuelle du 30 avril 2017 faisaient partie des « sommes distribuables » dont elle avait constaté l’existence, permettant à une assemblée ultérieure de les distribuer.

La position de la Cour de cassation

A cette question, la Cour répond que : « le report [à nouveau] bénéficiaire d’un exercice est inclus dans le bénéfice distribuable de l’exercice suivant et que, par voie de conséquence, seule l’assemblée approuvant les comptes de cet exercice pourra décider son affectation et, le cas échéant, sa distribution ».

La Cour ferme ainsi la porte à une distribution en cours d’année de dividendes prélevées sur le report à nouveau. En effet, il est traditionnellement considéré que l’assemblée n’a pas décidé de l’affectation des sommes sur ce compte et en a reporté la décision à l’année suivante. Par conséquent, elles ne font pas partie du résultat distribuable de l’exercice considéré. Elles viendront s’ajouter au bénéfice de l’exercice suivant, dont l’assemblée annuelle pourra alors décider la mise en distribution, la mise en réserve, ou le maintien en report à nouveau.

La Cour insiste sur le caractère impératif de ces dispositions, en soulignant que toute décision de distribution dudit report prise en dehors de l’assemblée appelée à approuver les comptes annuels est entachée d’un risque de nullité.

> Lire sur ce sujet : « La réforme du régime des nullités en droit des sociétés »

Les implications pratiques de la décision de la Cour de cassation

La distribution du report à nouveau hors AGOA (Assemblée Générale Ordinaire Annuelle) étant interdite, l’alternative repose donc sur le versement d’acomptes sur dividendes en cours d’exercice. Ce mécanisme est toutefois soumis à des conditions strictes posées par l’article L. 232-12, alinéa 2 :

  • avant toute distribution d’acomptes, il doit être constaté l’existence de sommes distribuables, c’est-à-dire de bénéfices qu’il est possible de distribuer sans mettre en péril la situation financière de la société ;
  • l’acompte ne peut être distribué que tant que l’assemblée ne s’est pas encore prononcée sur l’affectation des résultats de l’exercice concerné.

Enfin, l’article R. 232-17 du Code de commerce dispose que le conseil d’administration, le directoire ou les gérants, selon le cas, ont qualité pour décider de répartir un acompte à valoir sur le dividende et pour fixer le montant et la date de la répartition.

Une marge de manœuvre plus grande pour la distribution des réserves ?

La décision de la Cour de cassation s’inscrit dans une suite de jurisprudences de première instance et d’appel qui avaient semé le doute quant aux sommes pouvant être distribuées en cours d’année. En dernier lieu, une décision récente de la Cour d’appel de Paris laisse penser que contrairement au report à nouveau, les réserves pourraient bien faire l’objet d’une distribution hors AGOA.

Le jugement du Tribunal de commerce de Paris contre la distribution de dividendes hors AGOA

Dans un jugement du 23 septembre 2022,2 le Tribunal de commerce de Paris avait mis un frein à la pratique répandue selon laquelle les dividendes prélevés sur les comptes de réserve pouvaient être distribués pendant l’année.

Adoptant une lecture stricte de l’article article L. 232-11 du Code de commerce, à contre-courant de la pratique et de la doctrine, le tribunal en avait conclu que seule l’assemblée générale annuelle appelée à approuver les comptes pouvait décider d’une telle distribution.

Cette approche conservatrice était justifiée par le fait que les textes susvisés visent à s’assurer que la distribution envisagée correspond aux capacités de la société et ne port pas atteinte à sa solidité financière.

La position plus souple de la Cour d’appel de Paris concernant les dividendes prélevés sur les réserves

Par un arrêt rendu en tout début d’année,3 la Cour d’appel de Paris est venue apporter une analyse différente du juge de première instance. En effet, contrairement aux montants mis en report à nouveau, l’affectation de sommes sur des comptes de réserve a nécessairement été approuvée par une précédente assemblée générale annuelle. Ces sommes correspondent à des bénéfices accumulés, devenus des actifs durables. Leur distribution serait donc possible en-dehors de l’AGOA.

En l’absence de décision de la Cour de cassation, la position de la Cour d’appel dans cet arrêt vient donc donner un peu de confort pour d’éventuelles distributions en cours d’année par prélèvement sur les réserves.

Dans tous les cas, de telles distributions en cours d’année doivent être effectuée en veillant scrupuleusement à ce qu’elles ne remettent pas en cause la solidité financière de la société. D’autant plus lorsqu’elles interviennent tard depuis les derniers comptes disponibles.


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  1. Cass. com., 12 février 2025, n°23-11.410 ↩︎
  2. T. com. Paris, 16e ch., 23 sept. 2022, n°J2021000542 ↩︎
  3. CA Paris, 30 janv. 2025, n°22/17478 ↩︎

Nullités en droit des sociétés : le nouveau régime issu de la réforme de 2025

Le droit français des sociétés appréhende depuis longtemps avec une certaine prudence la sanction de la nullité et tend à en encadrer les conséquences. En effet, la société constitue une entité juridique singulière, autour de laquelle gravitent de nombreuses parties prenantes : actionnaires, dirigeants, salariés, ou encore prêteurs, clients et fournisseurs, susceptibles d’être directement ou indirectement affectés par la nullité de la société ou d’une décision sociale.

Dans ce contexte, la réforme mise en œuvre par l’ordonnance du 12 mars 20251 vise à clarifier le régime des nullités et à renforcer la sécurité juridique, en s’appuyant sur les conclusions d’un rapport du Haut Comité Juridique de la Place financière de Paris (HCJP) de 20202 et sur les recommandations du Conseil d’Etat du 4 juillet 20243. Elle vient par ailleurs aligner le droit français sur la Directive du 14 juin 20174.

Clarification du régime des nullités en droit des sociétés

L’ordonnance unifie le régime des nullités en droit des sociétés en supprimant les dispositions générales du Code de commerce, désormais intégrées au Code civil. Les articles 1844-10 et suivants du Code civil deviennent ainsi le droit commun, applicable à toutes les sociétés quelle que soit leur forme sociale. Par exception, des dispositions spécifiques à certaines formes sociales ou à des restructurations et opérations sur le capital sont maintenues au sein du Code de commerce.

La réforme vient également apporter une clarification terminologique en visant la nullité des « décisions sociales » et non plus des « actes et délibérations ». Ce détail a son importance car ne sont ainsi concernés que les actes décisionnels internes de la société, à l’exclusion des simples avis, opinions ou recommandations émis par des organes sociaux. Les conventions passées avec les tiers sont aussi clairement exclues du régime des nullités spécifique au droit des sociétés, leur nullité étant régie par le droit commun des contrats. Enfin, l’article L.228-59 du Code de commerce applique expressément le régime de nullité des décisions sociales aux décisions des assemblées générales d’obligataires.

Redéfinition des cas de nullité

Nullité de la société

S’agissant de la société elle-même, sa nullité ne peut désormais résulter « que de l’incapacité de tous les fondateurs ou de la violation des dispositions fixant un nombre minimal de deux associés » (article L.1844-10, al. 1, C. civ.). Cette nouvelle formulation vient supprimer de nombreux cas de nullité et aligner le droit français sur la directive du 14 juin 2017 et sur la jurisprudence de la Cour de cassation. La réforme va cependant au-delà en écartant de fait la sanction de la nullité en cas d’absence des éléments constitutifs de la société (article 1832, C. civ.), de violation des règles du droit commun des contrats, ou encore, en cas d’objet social statutaire illicite. Les cas de fraude ou de fictivité de la société ne sont pas non plus visés par l’article 1844-10 mais la nullité dans de tels cas pourrait être recherchée sur l’autres fondements.

Nullité des apports

S’agissant des apports faits à la société, le nouvel article 1844-10-1 du Code civil aligne les cas de nullité sur le nouveau régime applicable aux décisions sociales (cf. ci-après). La nullité de l’apport entraîne l’annulation des parts sociales ou des actions émises en contrepartie et la restitution, par la société, des engagements exécutés par l’apporteur. En cas de nullité de tous les apports, qu’ils soient souscrits au cours de la constitution ou postérieurement à celle-ci, la société est dissoute et il doit alors être procédé à sa liquidation.

Nullité des décisions sociales

S’agissant des décisions sociales, leur nullité ne peut désormais résulter que de « la violation d’une disposition impérative de droit des sociétés, à l’exception du dernier alinéa de l’article 1833, ou de l’une des causes de nullité des contrats en général ». Ainsi, alors qu’auparavant la nullité ne pouvait résulter que d’un texte la prévoyant expressément, le nouveau régime ouvre la nullité à la violation d’une disposition impérative de droit des sociétés (nullités « virtuelles »).

Cette évolution, qui résulterait de l’impossibilité de lister de façon exhaustive tous les cas de nullité, peut sembler contraire à l’objectif de clarification affiché par la réforme et remet dans les mains du juge le pouvoir d’apprécier le caractère impératif d’une disposition et son inclusion dans le champ du « droit des sociétés ». Le juge est donc mis au centre du dispositif. Cependant la réforme vise à encadrer son pouvoir via le mécanisme du « triple test » et à limiter les effets des nullités en limitant les nullités en cascade (voir ci-dessous).

A noter que la nullité des décisions sociales pour violation des statuts est désormais exclue, sauf disposition légale contraire. Cependant, dans les sociétés par actions simplifiées (SAS), les statuts peuvent prévoir la nullité des décisions sociales prises en violation des règles qu’ils établissent, conformément à l’article L. 227-20-1 du Code de commerce. L’action en nullité est alors régie par les articles 1844-10 et suivants du Code civil.

Le « triple test » : vers une appréciation plus nuancée des cas de nullité des décisions sociales

L’ordonnance introduit au nouvel article 1844-12-1 du Code civil le mécanisme du « triple test ». Ainsi, le juge ne peut prononcer effectivement la nullité d’une décision sociale irrégulière que si les trois critères suivants sont réunis :

  • existence d’un grief : le demandeur doit démontrer que l’irrégularité a porté atteinte à l’intérêt protégé par la règle dont la violation est invoquée ;
  • influence sur la décision : il doit être établi que l’irrégularité a eu une incidence sur le sens de la décision contestée ;
  • proportionnalité des conséquences : le juge doit s’assurer que les effets de la nullité ne sont pas excessifs pour l’intérêt social, au regard de l’atteinte subie.

Ce dispositif met fin à l’automaticité du prononcé de la nullité, permettant ainsi une appréciation plus équilibrée des situations litigieuses. Par exception, la nullité automatique est maintenue par l’ordonnance dans certains cas dans lesquels l’application de l’article 1844-12-1 est expressément écartée par les textes.

Prévention des nullités en cascade

Pour éviter les effets perturbateurs des nullités en cascade et renforcer la stabilité des décisions sociales, la réforme insère aux nouveaux articles 1844-15-1 et 1844-15-2 du Code civil deux mécanismes :

  • la protection des décisions prises par un organe irrégulièrement composé : la nullité de la nomination ou du maintien irrégulier d’un organe ou de l’un de ses membres n’entraîne pas automatiquement la nullité des décisions prises par celui-ci – il s’agit là de l’extension à l’ensemble des sociétés d’une règle qui existait déjà pour les sociétés par actions ;
  • la possibilité de différer les effets de la nullité : le juge peut différer dans le temps les effets d’une décision de nullité lorsque leur rétroactivité serait de nature à produire des effets manifestement excessifs pour l’intérêt social.

Réduction du délai de prescription de l’action en nullité

Le délai de prescription de droit commun des nullités en matière sociétaire est réduit de trois à deux ans (article 1844-14, Code civil). Cette mesure vise à renforcer la sécurité juridique en incitant les parties à agir dans des délais plus courts.

Régime spécifique de nullité des opérations de restructuration des sociétés par actions

Nullité des augmentations de capital

S’agissant des nullités relatives aux augmentations de capital des sociétés par actions, l’ordonnance introduit aux articles L. 22-10-55-1 et L. 225-149-4 du Code de commerce un régime de prescription particulier :

  • dans les sociétés cotées : l’action en nullité n’est plus recevable dès la réalisation de l’opération, en raison de la fongibilité des actions et de la centralisation des transactions ;
  • dans les autres sociétés : l’action en nullité est ouverte pendant un délai de trois mois à compter de la date de l’assemblée générale ou de la décision contestée.

Enfin, le nouvel article L. 225-149-5 du Code de commerce dispose que la nullité de la décision d’augmentation du capital est opposable à tous les souscripteurs, par dérogation à l’article 1844-16 du Code civil.

Nullité des fusions, scissions et opérations assimilées

Concernant les opérations de restructuration des sociétés par actions, les dispositions afférent à leur régime de nullité sont relocalisées au sein des articles L.236-2-1 (s’agissant des fusions) et L.236-19-1 du Code de commerce (s’agissant des scissions).

La nullité d’une opération ne peut résulter que de la nullité de la délibération de l’une des assemblées l’ayant décidée ou du défaut de dépôt de la déclaration de conformité. L’action se prescrit par six mois à compter de la date de la dernière inscription au registre du commerce et des sociétés rendue nécessaire par l’opération, étant précisé que le tribunal peut accorder aux sociétés intéressées un délai de régularisation lorsqu’une telle régularisation est possible.

Enfin, la nullité n’affecte pas les obligations nées entre la date d’effet de l’opération annulée et la publication de la décision du tribunal prononçant la nullité. Les sociétés participantes restent alors responsables solidairement de l’exécution de ces obligations.


L’ordonnance du 12 mars 2025 entrera en vigueur le 1er octobre 2025, son application aux sociétés constituée et aux décisions sociales prises avant cette date devra être analysée au regard de l’acte dont la nullité est demandée et des fondements juridiques invoqués.


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  1. Ordonnance n° 2025-229 du 12 mars 2025 portant réforme du régime des nullités en droit des sociétés ↩︎
  2. Rapport sur les nullités en droit des sociétés, Haut Comité Juridique de la Place financière de Paris, 27 mars 2020 ↩︎
  3. Note sur la simplification du régime des nullités en droit des sociétés (Livre II du Code de commerce), Conseil d’Etat, 4 juillet 2024 ↩︎
  4. Directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés ↩︎

Rapport de durabilité et devoir de vigilance : ce que changent la Directive « Stop the Clock » et la loi DDADUE 2025

Au niveau européen, la directive « Stop the Clock »1 publiée le 16 avril 2025 et résultant du « Paquet Omnibus » a ouvert la voie au décalage des calendriers d’entrée en application des deux directives précitées. Dans le même temps, la loi « DDADUE 2025 »2 publiée le 2 mai 2025 aligne, avec une rare célérité, le droit national sur le nouveau calendrier européen s’agissant des obligations de reporting de durabilité.

Ce report a été justifié par la volonté d’observer les premières publications des grandes sociétés cotées avant d’étendre les obligations issues de la directive CSRD3 à de nouvelles entreprises et, plus généralement de laisser aux entreprises le temps d’adapter leurs outils de reporting et de conformité, dans un souci de renforcer la compétitivité des entreprises européennes.

D’autres assouplissements sont en cours de discussion au niveau de l’UE dans le cadre du « Paquet Omnibus II ».

Report des délais de publication des rapports de durabilité prévus par la CSRD

En matière de reporting extra-financier, la directive « Stop the Clock » décale l’entrée en application des obligations de publication des rapports ESG pour les deuxième et troisième vagues d’entreprises initialement concernées :

  • Les entreprises relevant de la « vague 2 » — soit celles remplissant au moins deux des trois critères suivants : un effectif supérieur à 250 salariés, un chiffre d’affaires dépassant 50 millions d’euros ou un total de bilan excédant 25 millions d’euros — étaient initialement tenues de publier leur rapport à partir de 2026. Cette échéance est désormais repoussée à 2028, relativement à l’exercice commencé en 2027.
  • Les entreprises de la « vague 3 », correspondant aux PME cotées sur un marché réglementé, devaient quant à elles publier leur rapport à partir de 2027. Elles devront finalement se conformer à cette obligation en 2029 relativement à l’exercice commencé en 2028.

Les entreprises de la première vague — à savoir celles cotées en bourse, employant plus de 500 salariés et réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros — ne sont pas concernées par ce décalage de calendrier. Elles demeurent soumises aux obligations de publication initialement prévues.

Concernant les entreprises de la « vague 4 », soit les sociétés non européennes réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 150 millions d’euros dans l’Union européenne et disposant d’une filiale soumise à la CSRD ou d’une succursale réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 40 millions d’euros, le calendrier reste inchangé et le premier rapport devra être publié en 2029 relativement à l’exercice commencé en 2028.

Décalage du calendrier d’entrée en vigueur de la directive CS3D sur le devoir de vigilance

S’agissant du devoir de vigilance des entreprises en matière de protection de l’environnement et de respect des droits humains, la directive « Stop the Clock » prévoit un report d’un an de l’application de la directive CS3D4 pour la première vague d’entreprises concernées. Les grandes entreprises, à savoir celles employant plus de 5 000 salariés et réalisant un chiffre d’affaires mondial supérieur à 1.500 millions d’euros devront donc être en conformité à compter du 26 juillet 2028.

En revanche, les autres entreprises relevant du champ d’application de la directive CS3D ne bénéficient d’aucun aménagement de calendrier.

Enfin, les Etats membres bénéficient également d’un délai rallongé d’un an, soit jusqu’au 26 juillet 2027, pour transposer la directive dans leur droit national.

Loi DDADUE 2025 : transposition du décalage de calendrier et atténuation des obligations ESG

La loi « DDADUE 2025 », portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union Européenne en matière environnementale, publiée le 2 mai 2025, aligne le droit national sur les décalages de calendrier prévus par la directive « Stop the Clock » en modifiant les échéances initialement prévues par l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023. En parallèle de ces reports, elle introduit également de nouvelles dispositions venant alléger certaines règles en matière de reporting extra-financier.

Suppression des sanctions pénales pour manquements à la directive CSRD

L’article L. 822-40 du Code de commerce, qui prévoyait des sanctions pénales pour l’absence de désignation d’un certificateur des informations extra-financières ou pour entrave à la certification, est supprimé. Ces infractions étaient respectivement punies de deux et cinq ans d’emprisonnement et de 30.000 et 75.000 euros d’amende.

Exemption de l’obligation de publier un bilan BEGES

Certaines entreprises, déjà tenues de publier un BEGES (bilan des émissions de gaz à effet de serre) en vertu des articles L. 232-6-3 et L. 233-28-4 Code de commerce, seront désormais dispensées de le faire au titre de l’article L. 229-25 du Code de l’environnement.


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  1. Directive (UE) 2025/794 du Parlement européen et du Conseil du 14 avril 2025 modifiant les directives (UE) 2022/2464 et (UE) 2024/1760 en ce qui concerne les dates à partir desquelles les États membres doivent appliquer certaines obligations relatives à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises et au devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité ↩︎
  2. Loi n° 2025-391 du 30 avril 2025 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes ↩︎
  3. Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) no 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises ↩︎
  4. Directive (UE) 2024/1760 du Parlement européen et du conseil du 13 juin 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et modifiant la directive (UE) 2019/1937 et le règlement (UE) 2023/2859 ↩︎

Fusion-absorption : Disparition de la personnalité juridique de l’absorbée et action en justice

Les conséquences des opérations de fusions-absorptions ont été l’objet de plusieurs précisions jurisprudentielles ces dernières années, qu’il s’agisse du sort de la caution, du transfert des responsabilités ou des subtilités procédurales. Dernièrement, par un arrêt rendu le 15 janvier 2025 (23-84.906), la chambre criminelle de la Cour de cassation a confirmé que la fusion-absorption entraînant l’extinction de la personnalité juridique de la société absorbée, celle-ci ne peut plus ester en justice. Une irrégularité de constitution en première instance ne peut être corrigée par la constitution ultérieure de la société absorbante en appel.

La prise en compte procédurale de la disparition de la personnalité juridique lors d’une fusion-absorption

Une société, absorbée par fusion au 1er janvier 2016, s’était constituée partie civile lors d’une audience du tribunal correctionnel le 1er février 2017. En appel, c’est toutefois la société absorbante qui avait repris ses droits et s’était, à son tour, constituée partie civile.

Dans son pourvoi, le demandeur critiquait notamment la Cour d’appel de Fort-de-France d’avoir déclaré recevable la constitution de la société absorbante alors même que celle-ci ne s’était pas constituée en première instance.

La Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel pour défaut de motivation. Selon la Haute juridiction, les juges du fond auraient dû vérifier si, au moment de l’audience du 1er février 2017, la société absorbée disposait encore d’une existence juridique lui permettant d’agir en justice. En d’autres termes, si la fusion avait déjà produit ses effets et entraîné la disparition de la personnalité morale de la société absorbée, celle-ci n’ayant plus la capacité d’ester en justice.

Un cas d’application qui confirme la jurisprudence récente

In fine, cette solution s’inscrit dans une jurisprudence bien établie de la Cour de cassation, qui rappelle de manière constante que la perte de la personnalité morale d’une société absorbée entraîne son incapacité à agir en justice. Une irrégularité ne pouvant être corrigée par l’intervention ultérieure de la société absorbante.

La chambre commerciale de la Cour de cassation avait jugé qu’un appel formé par une société dépourvue de personnalité morale ne pouvait être régularisé par l’intervention ultérieure de la société absorbante (Cass. com., 13 mars 2019, n°17-20.252). De même, la Cour a estimé qu’une assignation délivrée par une société absorbée était irrégulière dès lors que celle-ci avait perdu son existence juridique au jour de l’acte introductif d’instance (Cass. civ. 2e, 12 février 2004, n°02-13.672).

Cette décision n’est pas non plus sans rappeler un arrêt de la Cour de cassation (Cass. Civ 2e, 8 septembre 2022, n°21-11.892), dans lequel le demandeur avait, cette fois, assigné une société n’ayant plus d’existence juridique. Bien que la société absorbante soit intervenue volontairement à l’instance, la Cour de cassation a estimé que cette irrégularité de fond ne pouvait être régularisée par la constitution de l’absorbante.

Plus récemment, les juges du droit avaient également précisé certaines règles procédurales en rappelant notamment que la partie adverse doit présenter des demandes à la société absorbante lorsque celle-ci vient au droit de l’absorbée (Cass. Com, du 18 septembre 2024, n°23-13.453).

Ainsi, la Cour de cassation semble avoir largement clarifié le contentieux autour des questions procédurales entourant le domaine des fusions-absorptions et notamment concernant l’absence de personnalité morale et de capacité à ester en justice en fonction des différentes situations (assignation, reprise d’instance…).

Bien que l’arrêt, sujet du présent article, ne fasse pas l’objet d’une publication au Bulletin de la Cour de cassation, celui-ci présente néanmoins le mérite de préciser une nouvelle application des principes esquissés par la Cour.

La liquidation de sociétés in bonis – PLC Practical Law

Ce guide détaillé présente le cadre juridique et les étapes procédurales pour la dissolution d’une société in bonis constituée sous la forme de SA, SAS ou SARL, notamment :

  • Les résolutions des actionnaires et les majorités requises ;
  • La nomination et les missions du liquidateur ;
  • Les formalités légales, y compris les obligations de publication et d’enregistrement ;
  • La répartition des actifs et les implications en matière de responsabilité des actionnaires ;
  • Les risques potentiels, notamment en matière fiscale et sociale.

Cette ressource apporte un éclairage précieux aux professionnels du droit, aux chefs d’entreprise et aux investisseurs confrontés à la dissolution de sociétés commerciales en France.

Retrouvez la contribution complète sur le site de PLC Practical Law (Thomson Reuters) : Closing Down a Solvent Private Company (France) | Practical Law.

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